Objectives : Une étude de la cohorte Danoise (Helleberg and al. CID 2013) avait montré qu’une baisse importante du nombre de lymphocytes CD4 chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) avec une charge virale contrôlée sous- traitement antirétroviral combiné (TAR) était associée à un risque de morbidité sévère et de décès. Nos objectifs étaient d’évaluer le risque de baisse importante des CD4, d’en identifier les facteurs associés et d’évaluer son association avec le risque de morbidité sévère (maladies cardiovasculaires, cancers, décès) chez les PVVIH ayant initié un TAR entre 2006 et 2018.
Matériels et Méthodes :
Les PVVIH adultes suivis dans la base de données hospitalière française sur le VIH (ANRS CO4-FHDH) ont été sélectionnées s’ils avaient atteint au moins 9 mois de suppression virologique après l’initiation du TAR, avaient été suivies deux ans après le contrôle virologique et n’avaient pas d’antécédent de cancer ou d’événement cardiovasculaire.
Un déclin de CD4 était défini par l’obtention de 2 différences relatives consécutives supérieures à 15 %, calculées à partir des moyennes mobiles de 3 mesures consécutives des CD4. Chez les participants ayant eu un déclin de CD4, nous avons modélisé les mesures des CD4, CD8 et lymphocytes totaux avant et après le début du déclin de CD4 avec la régression de spline cubique. Nous avons estimé le taux d’incidence (TI) d’un déclin de CD4, analysé les facteurs associés à ce déclin, et évalué son association avec le risque de morbidité sévère (maladies cardiovasculaires, cancers, décès), pendant ou après les 6 mois suivant le déclin en utilisant une régression de Poisson.
Résultats : Parmi 14 140 participants (50 372 personnes-années (PA)) sélectionnés pour l’étude, 122 ont présenté un déclin de CD4 (TI= 2.43 pour 1000 PA [intervalle de confiance (IC) à 95%, [2.07-2.79]). Le risque de déclin de CD4 était associé à un âge élevé (ratio TI, 5.0 [IC 95%, 1.5-15.9] chez les >50 ans vs <30 ans). Un déclin a été également observé pour les CD8 et le nombre total de lymphocytes. Le taux ajusté d’incidence de morbidité sévère était de 5.0 /1000 PA [IC 95 %, 4.0-6.2] chez les personnes sans déclin, de 73.4 /1000 PA [IC 95 %, 32.1-168.6] pendant les 6 premiers mois suivant le déclin et de 8.9 /1000 PA [IC 95 %, 3.3-24.1] après 6 mois chez les personnes avec un déclin. Ainsi au cours des 6 premiers mois, le risque de morbidité sévère était 15 fois plus élevé chez les personnes ayant connu un déclin de CD4 comparativement à ceux n’ayant pas subi de déclin (TI ratio, 14.7 [IC 95 %, 6.6-33.1]). Le risque de survenue de chaque événement morbide a également été évalué (voir tableau).
Conclusion : Un déclin important de CD4 était un événement rare et lié à une lymphopénie globale chez les PVVIH ayant une suppression virale après avoir initié un TAR entre 2006 et 2018. Ce déclin était associé à l’âge, et à un risque plus élevé de morbidités sévères ou de décès au cours des 6 premiers mois suivant le déclin.